Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
11 juin 2011 6 11 /06 /juin /2011 15:55

Dans le hall, on trouve quelques photographies de la cérémonie de transfert des cendres du 3 octobre 2006. La première pierre du monument avait été posée le 5 février 2005 en présence du président Chirac. Cette fois, c'est le Ministre des Affaires Etrangères, Philippe Douste-Blazy à l'époque, qui représenta la France, aux côtés des présidents du Congo, du Gabon et de Centrafrique.

La famille de Savorgnan de Brazza avait insisté pour que le descendant du Makoko soit présent, en mémoire du traité de 1880. Ce fût chose faite, avec quelques réticences cependant du côté des autorités congolaises. Mais Auguste Nguempio, accompagné par la cour royale Téké, participa bien, en habits traditionnels, à la cérémonie.

Les restes mortuaires de l'explorateur et de 5 membres de sa famille (sa femme Thérèse et ses quatre enfants, Jacques, Antoine, Charles et Marthe) ont alors rejoint la crypte du mémorial. Son fils Jacques est mort très jeune. Singulièrement, aucun de ses autres enfants n'a eu de descendant. Ce sont donc des arrières petits-neveux qui ont représenté la famille de Brazza lors de la cérémonie. L'un de ses petits-neveux, Detalmo Pirzio Biroli, à l'origine du projet en 2003, ne verra pas son voeu exaucé, disparaissant en mars 2006.

 

crypte-mausolée-brazza

Jour du transfert des cendres : crypte du mémorial (© Patrick Robert -Grands Reporters.com)

 

Espérons pour lui que ce soit sa dernière demeure. En effet Pierre Savorgnan de Brazza qui avait beaucoup voyagé de son vivant, a également continué à voyager une fois mort ! 

Il est mort à Dakar le 14 septembre 1905. Sa femme Thérèse de Chambrun est alors persuadée qu'il a été empoisonné (aucune preuve à ce jour...). L'ultime mission avait en effet pour but d'enquêter sur les pratiques des compagnies concessionnaires qui se partageaient alors l'exploitation du Congo français. Brazza s'était déjà opposé à elles en 1897 et s'était vu ensuite écarté de ses fonctions en 1898. L'enquête est déclenchée par les exactions de certains colons, le point d'orgue étant la terrible affaire Georges Toqué et Fernand Gaud qui firent sauter avec un bâton de dynamite un de leur ancien guide congolais, le 14 juillet 1903. Horrible façon de célébrer la Fête Nationale...

Le 3 octobre 1905, Brazza a droit à des obsèques nationales à Paris et fut enterré une première fois au cimetière du Père Lachaise. Quelques temps après, le gouvernement pensait à le faire entrer au Panthéon... Mais son épouse s'y opposa et décida de déplacer le corps à Alger, où elle vivait dans la villa familiale. La dépouille de l'explorateur rejoint donc celle de son fils Jacques, et est inhumé au cimetière des Brus, à Alger, le 22 décembre 1908. Le mausolée de la ville blanche portera l'épitaphe "Sa mémoire est pure de sang humain", rédigée par son ami Charles de Chavannes célébrant par cette phrase son pacifisme.

Et voici qu'en 2003, on songe à lui trouver une autre sépulture dans la ville qui porte son nom. Cela se concrétise en 2005. Et c'est donc la troisième fois qu'il est inhumé, ce 3 octobre 2006, au Congo, après que l'avion le transportant ait fait une dernière halte à Franceville au Gabon (ville qu'il avait également contribué à fonder, en libérant notamment des esclaves).

Cette célébration provoqua de vifs débats, les plus virulents opposants proposant ainsi une toute autre épitaphe : "A Pierre Savorgnan De Brazza, père de l'invasion coloniale congolaise, les colonisés reconnaissants"... L'approche de l'histoire coloniale n'est toujours pas apaisée !

 

famille-brazza-1900

Brazza, sa femme et ses enfants Jacques et Antoine en 1900 (Archives Pirzio Biroli, Italie)

 

Nous empruntons à notre tour le bel escalier en marbre pour rejoindre la crypte. L'atmosphère est propice au recueillement. En arc de cercle, les 6 tombeaux de différentes tailles sont alignés. Le plus grand à droite est celui de Savorgnan de Brazza. Un crucifix est posé sur le marbre blanc. Le lieu est assez dépouillé à part quelques panneaux explicatifs.

 

mausolée-tombeau-brazza

Tombeau de Pierre Savorgnan de Brazza (1852-1905)

 

Je fais une photo souvenir de Manu et Frédéric devant le tombeau. Un groupe de jeunes congolais (environ 18 ans) fait de même. J'essaie d'établir le dialogue avec ces jeunes hommes en leur demandant ce que représente Brazza pour eux. J'ai du mal à obtenir une réponse. Hésitations... L'un d'eux me dit que c'est grâce à lui que le Congo existe aujourd'hui et que "l'on est comme ça", en me montrant ses vêtements. Un premier pas vers la modernité ?

Nous remontons dans le hall et regardons quelques instants un téléviseur qui diffuse des images d'archives. Nous tombons sur les "journées révolutionnaires" de 1963 ayant conduit à la chute du Président Fulbert Youlou et à l'instauration d'un régime marxiste.

 

Pour compléter le mémorial, le gouvernement congolais a prévu la construction d’un véritable musée, d’un centre de conférences et d’une bibliothèque. Nouvelle polémique deux ans après la cérémonie, la famille de Brazza constate que les termes de l'accord ne sont pas tous respectés... L'Etat congolais s'était engagé à rénover le lycée portant le nom de l'explorateur et surtout à améliorer les conditions de vie des habitants de Mbé (lieu de signature du traité avec le Makoko, à environ 150 km au nord de Brazzaville). Ils attendent toujours les infrastructures promises... 

 

Post-scriptum 

Un membre de la famille un peu oublié, c'est le frère cadet de Pierre, prénommé Jacques. Il participa lui aussi aux expéditions d'exploration du Congo, notamment d'un point de vue scientifique, de part sa qualification de docteur en sciences naturelles. Entre 1883 et 1886, il parcourt  l'Afrique Centrale avec François Rigail de Lastours et Albert Dolisie et pénètre largement à l'intérieur du continent. Il rebrousse chemin en atteignant l'Oubangui, à cause de l'hostilité des indigènes.

 

jacques-de-brazza congo

Jacques de Brazza, 1859-1888 (©Archivio Storico capitolino, Rome) 

 

Il effectue de multiples croquis, prend des notes à caractère ethnographique et collecte de nombreux objets. Plusieurs espèces jusqu'alors inconnues du reste du monde vont ensuite porter le nom de Brazza (singe cercopithèque, coucou Centropus, plante de la famille des Lecythidaceae...).

Rigail de Lastours meurt de fièvres en 1885, et Jacques de Brazza qui lui succède dans ses fonctions, meurt à son tour en 1888, peu après son retour en Europe. ll n'a que 29 ans.

 

 

Sources  :

http://www.brazza.culture.fr/

http://www.afrik.com

http://www.brazzaville-adiac.com

Partager cet article
Repost0

commentaires

R
j'aime cette tombeaux
Répondre