Après l'alambic rudimentaire, en repartant, je remarque un grand pigeonnier perché sur des poteaux en bois. Il est constitué de bois et de tôles. Cependant, il semble abandonné.
Pigeonnier à Loudima
L'élevage de pigeons est une vieille tradition au Congo, si j'en crois les documents anciens montrant cette activité. Il était notamment pratiqué dans le Mayombe.
J'ai vu la vente de pigeons verts à Pointe-Noire, espèce sauvage vivant dans les forêts, fréquentant les alentours des villages. Mais c'est une autre espèce de pigeon qui était domestiquée.
Pigeonniers dans la région limitrophe du Mayombe vers 1930 (© René Moreau)
Les pigeonniers anciens étaient fort jolis, faits de pisé ("poto-poto"), comme le décrivait un Père Blanc en 1913 au Congo belge : " Sur des perches fourchues fixées en terre, on place horizontalement des sticks qu'on recouvre de boue ; c'est un plancher de pisé. De place en place, dans ce pisé, sont évidés des nids ; on dirait des fonds d'assiettes. Par endroits, on remarque une ouverture dans le plancher de pisé : c'est pour laisser tomber la saleté. Sur ce plancher s'élève une cabane basse à toit conique; c'est une cahute en pisé et en chaume. La façade se présente comme nos pigeonniers d'ici, avec des ouvertures dans le pisé ".
Les toits des pigeonniers n'étaient pas coniques dans le Mayombe. La maison des pigeons ressemble à celle des villageois qui les élèvent !
Pigeonnier d'un village du Mayombe vers 1950 (© Françoise)
Le père Joseph veut nous faire une surprise. Il tient à nous faire rencontrer quelqu'un du village, mais reste mystérieux quant à son identité...
Nous poursuivons notre visite au milieu des maisons en briques sagement alignées. Nous découvrons alors une charmante scène familiale.
Grand-mère et sa petite-fille
Dans une cour de terre battue, une vieille femme assise sur un tabouret tient dans ses bras un bébé. Nous saluons les femmes assises autour, et la cour étant ouverte, nous engageons facilement le dialogue.
J'apprends qu'il s'agit d'une grand-mère avec sa petite-fille. L'aïeule se prénomme Thérèse et l'enfant... Thérésia ! Manu m'explique que le prénom de la grand-mère est passé de mode ("ça fait trop vieux") par conséquent, on a modernisé le prénom de la petite-fille.
Je demande si je peux prendre une photo. Les villageoises acceptent volontiers. La grand-mère dans son beau pagne esquisse un timide sourire et sa petite-fille continue de dormir paisiblement dans ses bras.
Ma foi, je suis satisfait du résultat. C'est l'un des plus beaux portraits que j'ai réalisé au Congo. Simple et naturel, sans mise en scène. Je montre le cliché à tout le monde, à la mère de l'enfant et bien sûr à Thérèse qui parait émue.
Source :
Les Baluba (Congo Belge), R. P. Colle, Missionnaire des Pères Blancs d'Afrique - 1913