Un établissement hôtelier a marqué la mémoire des anciens ponténégrins, c'est l'hôtel du Plateau.
Il tire bien entendu son nom du quartier de Pointe-Noire où il est situé, en haut de l'avenue de Gaulle, à droite en montant, environ 800 m avant le "village africain" (de fait, pas très loin de l'évêché).
Pour être exact, il se nommait au tout début "AU plateau" comme on peut le voir sur le cliché ci-dessous. L'entrée est encadrée par les mentions "Bar" et "Hotel", et à gauche on lit "Restaurant".
"Au Plateau", hôtel restaurant de Pointe-Noire vers 1945 (carte photo - Anonyme)
Je n'ai pas trouvé de date précise de construction de l'hôtel. Je suppose vers 1940 (cf http://voyage-congo.over-blog.com/2015/03/pointe-noire-hotel-du-plateau-chantier.html). La construction, assez massive, ne fait pas dans les fioritures. Seules quelques courbes viennent rompre la monotonie des ouvertures rectangulaires du rez-de-chaussée. Les moyens étaient limités à l'époque !
La façade affiche aussi "Etablissements Louis Anselmi". La famille Anselmi possédait déjà une "concession" à Pointe-Noire en 1934. Louis (Luigi) Anselmi dirigeait une entreprise générale de Travaux Publics (Anselmi et Cie, devenue ensuite la SAGETRAN).
Cet hôtel accueillait très souvent les primoarrivants au Congo. Ils y passaient quelques jours ou semaines, le temps de trouver et d'aménager un logement.
La famille Anselmi louait également des "cases" avec jardin, ce qui permettait de profiter de quelques fruits tropicaux, directement sous la main.
Colons devant l'hôtel "Au Plateau" vers 1945 (détail carte photo - Anonyme)
Au seuil de l'entrée, surmontée d'une marquise en tissu, on identifie une femme blanche (la "patronne" ?). Sur la terrasse, deux hommes sont attablés, chacun de leur côté. A gauche, discrètement, un employé noir pointe le nez à la fenêtre... Un autre individu, tout de blanc vêtu, pose accoudé à la portière de sa belle auto. Quel luxe pour l'époque ! Ce n'est pas en tout cas une photo impromptue. Est-ce la famille Anselmi posant devant sa propriété ?
NB : Luigi Anselmi figure sur cette photographie, avec Virginia son épouse et leur fils Franco (d'après leur arrière-petite-fille).
On remarque aussi que les premiers arbres plantés devant l'hôtel étaient des badamiers, reconnaissables à leur ramure et leur feuillage caractéristiques (cf Pointe-Noire : le badamier ).
Hôtel du Plateau vers 1955 (carte postale)
L'hôtel cette fois DU Plateau, dans les années 1950-60, occupait ce même emplacement. Il faisait toujours office de bar, café et restaurant, selon les inscriptions lisibles à l'entrée.
On note que le bâtiment initial a été largement remanié. Il a gagné une nouvelle aile, à droite de l'entrée. Les ouvertures ont été refaites au rez-de-chaussée (fini les "arrondis" !) et de petits balcons ont vu le jour à l'étage. Le toit en tôles en encorbellement a été remplacé (ou en tout cas masqué) par un muret qui réhausse la façade.
La densité de circulation était bien moindre qu'aujourd'hui sur l'avenue de Gaulle. Le piéton (en short, les mains dans les poches) pouvait poser sans craindre l'accident...
Il parait que dans les années 1950, un grand Noir prénommé "Maoussa" (?) marchait devant l’hôtel avec un énorme crabe tenu en laisse avec une ficelle, en cherchant à le vendre !
Le Migitel vers 2005 (source : pontonlabelle2.skyrock.com)
Aujourd'hui, le Migitel est le successeur de l'hôtel du Plateau. Extérieurement, il n'a presque pas changé par rapport à la seconde version, excepté la couleur de la façade et l'apparition de la climatisation.
J'avais photographié en 2012 la façade de cet hôtel, implanté à l'angle de l'avenue de Gaulle et de l'avenue Barthélémy Boganda (qui mène entre autre à une boite de nuit et à un établissement "concurrent", le Guest House).
Hôtel Migitel, avenue de Gaulle (2012 © FabMoustic)
La façade du Migitel a été repeinte en vert pistache assez récemment. La dénomination vient des prénoms des propriétaires du moment, MI comme Micheline, GI comme Gilbert (décédé depuis) et TEL comme... hôTEL !
La densité de construction a bien augmenté aux alentours, depuis le premier cliché des années 1940, sans parler de la circulation automobile.
Mais la ville a gardé le souvenir de la famille Anselmi, patronyme d'origine italienne, en donnant le nom "Stade Franco Anselmi" en 1953 à l'équipement tout proche de l'hôtel du Plateau, stade construit en 1939 pour l'ASP (Association Sportive Ponténégrine). Franco est en effet décédé prématurément, son fils Jean-Claude sera élevé par ses grands-parents Luigi et Virginia Anselmi.