Carnets de voyages au Congo-Brazzaville, principalement à Pointe-Noire, mais aussi dans d'autres régions du Congo, agrémentés de photos, d'informations culturelles et touristiques et d'impressions personnelles.
J'ai trouvé au dos de cartes postales le récit du périple de Bangui à Pointe-Noire d'un employé de banque. Le courrier n'est pas daté, mais la voie ferrée évoquée, le CFCO, étant en partie en service (à l'exception du tronçon M'vouti - Madingou), c'est vers 1931-32.
Cela permet de se rendre compte des difficultés de l'époque pour voyager à travers l'Afrique Equatoriale Française. Près d'un mois pour effectuer ce trajet, avec de nombreux types de transport ! En voici le texte.
Cher monsieur Laurent,
Me voici une fois de plus changé de poste. Il y a au moins cet avantage, dans notre maison, c'est qu'on voyage beaucoup. Je viens de faire une splendide randonnée de près d'un mois à travers l'A.E.F. et le Congo Belge. Sauf l'avion, j'ai utilisé pour ce voyage, tous les modes de locomotion ou presque. J'ai commencé par une journée d'autocar, de Bangui à Mongoumba. J'ai continué par trois journées de remorqueur ; rejoint le bateau fluvial à Dongon.
En baleinière sur l'Oubangui (© Giraud - carte postale vers 1910)
Quelques huit jours de navigation sur l'Oubangui d'abord, sur le Congo ensuite. Plusieurs heures de baleinière et de pinasse après.
Arrivée d'un bateau à Brazzaville (carte postale vers 1930)
Rejoint la gare en pousse-pousse. Pris la draisine à Brazzaville (auto sur rail).
Draisine du CFCO vers Mindouli en 1931 (Anonyme © CAOM)
A Madingou, m'attendait une superbe Torpédo dans laquelle j'ai traversé le massif du Mayumbe.
Excursion en auto vers Brazzaville (carte postale vers 1930)
Franchi en tipoye, voire à pied, les passages les plus dangereux. Enfin à M'Vouti, chemin de fer jusqu'à Pointe-Noire.
Moyen-Congo, transport en tipoye (© Dauvissat - carte postale vers 1920)
Et me voici aujourd'hui dans la future capitale de l'A.E.F. C'est presque la France ; on voit passer les bateaux, il y a l'eau courante et des W.C. à l'étage.
Gare de M'vouti - 1932 - Autos et autocars faisant la liaison avec Madingou (© CAOM)
Vous me parlez des restrictions que vous subissez à la Banque de France. Mais vous êtes sur un lit de roses ! Ici, tout ce qui n'est pas administration ou armée, vit sur un volcan. On s'y fait d'ailleurs très bien, et à force d'avoir des soucis, on finit par ne plus s'en faire du tout !
Par exemple, je souris franchement lorsque je lis dans les journaux tout ce qui s'écrit sur les colonies, sur l'idée coloniale... sur la "plus grande France" ! Croyez-moi : la France d'une part, ses colonies de l'autre, sont deux choses bien distinctes !
Mes hommages à madame Laurent, et à vous, cher monsieur Laurent, mon respectueux et meilleur souvenir.
[Signature illisible]
L'employé de la Banque de France signale au passage, mine de rien, le dénuement de la colonie du Congo et le décalage notable entre les discours ronflants sur les colonies et la réalité des conditions de vie en AEF. Pointe-Noire commence tout juste à sortir de terre et à ressembler véritablement à une ville.
La route pour automobile, de Brazzaville à Pointe-Noire, est elle aussi "toute neuve" mais nécessite de mettre le pied à terre pour affronter les passages difficiles (les nombreux ruisseaux, rivières, et autres zones marécageuses). Les ponts doivent encore manquer !
Pousse-pousse à une roue au Congo Brazzaville vers 1950 (carte postale Hoa Qui)
NB : pour lever toute ambiguïté, les illustrations de l'article évoquant les différents moyens de transport, ne sont pas liées aux cartes écrites par l'employé de banque.