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11 juin 2011 6 11 /06 /juin /2011 10:15

Sur notre route, près du marché Concession, à l'angle d'une rue, je remarque un véhicule militaire abandonné, à moitié ensablé. C'est un vestige de la guerre civile qui secoua Brazzaville, il n'y a pas si longtemps. Mais Manu n'emploie pas ce terme, il parle des "événements socio-politiques".

 

bacongo-char-rue

Véhicule militaire dans le quartier Bacongo

 

On peut encore voir ça et là des impacts de balles sur les façades. La ville a connu en 1993-1994 puis entre 1997 et 1999 de violents combats à l'arme lourde. Rien que pour la période de juin à octobre 1997, le bilan officiel fait état de 15 000 morts. La population civile des quartiers sud considérée comme hostile au régime en place en a été notamment la victime, sur fond d'utilisation politique, dans les différents camps, de l'appartenance ethnique des opposants et chefs de guerre.

Mais le temps et les travaux de rénovation font disparaître peu à peu les traces de ce passé douloureux. Les cicatrices laissées dans les têtes et dans les coeurs des congolais prendront beaucoup plus de temps à se refermer...

 

bacongo-char-brazzaville

Carcasse du blindé sur cales

 

La carcasse imposante du blindé repose sur des cales en béton et les chenilles ont disparu. J'ai présumé qu'il s'agissait d'un char, mais ce serait plutôt un blindé "BTR" (transport de troupes). J'ai cru comprendre que le véhicule armé par ceux du nord de la capitale, a été arrêté et détruit par ceux des quartiers sud (Bacongo).

 

brazzaville-taxi-bacongo

Les taxis vert et blanc de Brazzaville

 

Après cette triste halte historique et guerrière, nous reprenons notre chemin. C'est de nouveau la circulation agitée de Brazzaville, les taxis qui klaxonnent, la poussière, les piétons et les deux roues entremêlés, les quartiers animés, les maisons en tôles et les étals et boutiques de toute sorte.

Nous descendons cette fois vers le Djoué, rivière située à la sortie sud de la ville. Au niveau d'un pseudo rond-point, nous tournons à gauche, empruntons un étroit chemin de terre et descendons de nouveau vers le fleuve.

 


Source : Yengo Patrice. « Chacun aura sa part » : les fondements historiques de la (re)production de la « guerre » à Brazzaville. Cahiers d'études africaines. Vol. 38 N°150-152. 1998. pp. 471-503.

 

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11 juin 2011 6 11 /06 /juin /2011 09:30

Déchargé de ce tracas logistique, nous voilà libres de poursuivre notre périple. Manu doit rejoindre le reste de sa famille. Nous repartons vers Bacongo, slalomons entre les ruelles et faisons une première halte devant une case, pour prendre sa fille, du moins je le découvre une fois sur place. Derrière un portail, nous entrons dans une cour, saluons les voisins, et au fond, une jeune femme sort de derrière un rideau et tend vers nous une petite fille, avec de jolies tresses.

Pas d'embrassade, on reste assez distant entre le père et la fille. Manu demande cependant que la petite soit "présentable", habillée avec une robe. Un petit fourneau alimenté au charbon de bois, sur le seuil de la case, crache de la fumée et m'incommode un peu. Quelques lézards courent le long des murs. La petite fille se prénomme Emmanuella, elle a 4 ans, mais parait plus âgée. Elle nous suit sans broncher. 

 

Nous reprenons le taxi avec Brice, direction cette-fois la maison maternelle. Je suis passé à l'avant à côté du chauffeur. A l'entrée d'une rue de sable gris, un étal (non réfrigéré bien sûr) présente de la viande. Le "boucher" chasse les mouches des morceaux de bidoche et la tête de l'animal (un boeuf ou taureau au pelage noir) est présentée à côté.

Nous nous garons ensuite devant une palissade de tôles rouillées. Puis nous entrons dans une petite cour toute en longueur. La "case" est en dur, avec un toit en tôles et des portes et volets en bois. Le long du mur en parpaings sèchent des serviettes.

 

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Case à Bacongo 

 

Une nièce de Manu nous accueille. C'est la grande fille de l'un des ses frères aîné, aujourd'hui décédé. On dispose de petits tabourets pour s'asseoir dehors.

Puis la mère de Manu sort de la maison. Manu dit alors "Voilà la vieille ! ". Un peu choqué par la trivialité du propos, je dis à Manu "C'est pas très gentil...". Il me répond en rigolant " Bah quoi, c'est vrai !". Je m'empresse de demander le prénom de sa maman. Elle se prénomme Pauline. Tiens, comme l'une de mes anciennes collègues de travail. Je lui dis que c'est un beau prénom.

 

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Manu et sa famille, dont maman Pauline

 

La brave femme qui a du mal à se déplacer, me sert la main. Elle a de gros doigts, ceux d'une personne ayant travaillé la terre, des mains de paysanne. Manu donne le poisson séché, ramené de Pointe-Noire, à sa mère. J'ai l'impression qu'elle comprend à peu près le français, mais elle ne le parle pas, en tout cas, elle n'échange pas dans cette langue avec son entourage.

Dans une brouette, je repère des tubercules blanchâtres en train de sécher. Frédéric me dit qu'ils seront écrasés pour faire du foufou (farine de manioc). Près de l'entrée, à l'extérieur, je remarque un petit enclos entouré de tôles, que je pense être la "douche".

Je propose bien sûr de faire une photo de famille. Tout le monde prend la pose dans la petite cour, je trouve l'angle de vue pour éviter d'être face au soleil.

 

Nous reprenons notre parcours avec notre taximan. Je parle avec Manu de sa mère. Il me dit qu'elle est née vers 1928, ce qui lui ferait environ 83 ans. Elle a eu huit enfants, dont le premier vers l'âge de 17 ans. Frédéric qui nous accompagne est le petit dernier, né en 1974. Je fais le rapide calcul que Pauline avait alors 46 ans. C'est encore "biologiquement" possible, mais la probabilité d'être enceinte à cet âge là est très faible. Peut-être faudrait-il rajeunir Pauline de 2 ou 3 ans ?? Nous ne le saurons jamais !

 

Après cet épisode familial, nous reprenons notre visite touristique.

 

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