Sur notre route, près du marché Concession, à l'angle d'une rue, je remarque un véhicule militaire abandonné, à moitié ensablé. C'est un vestige de la guerre civile qui secoua Brazzaville, il n'y a pas si longtemps. Mais Manu n'emploie pas ce terme, il parle des "événements socio-politiques".
Véhicule militaire dans le quartier Bacongo
On peut encore voir ça et là des impacts de balles sur les façades. La ville a connu en 1993-1994 puis entre 1997 et 1999 de violents combats à l'arme lourde. Rien que pour la période de juin à octobre 1997, le bilan officiel fait état de 15 000 morts. La population civile des quartiers sud considérée comme hostile au régime en place en a été notamment la victime, sur fond d'utilisation politique, dans les différents camps, de l'appartenance ethnique des opposants et chefs de guerre.
Mais le temps et les travaux de rénovation font disparaître peu à peu les traces de ce passé douloureux. Les cicatrices laissées dans les têtes et dans les coeurs des congolais prendront beaucoup plus de temps à se refermer...
Carcasse du blindé sur cales
La carcasse imposante du blindé repose sur des cales en béton et les chenilles ont disparu. J'ai présumé qu'il s'agissait d'un char, mais ce serait plutôt un blindé "BTR" (transport de troupes). J'ai cru comprendre que le véhicule armé par ceux du nord de la capitale, a été arrêté et détruit par ceux des quartiers sud (Bacongo).
Les taxis vert et blanc de Brazzaville
Après cette triste halte historique et guerrière, nous reprenons notre chemin. C'est de nouveau la circulation agitée de Brazzaville, les taxis qui klaxonnent, la poussière, les piétons et les deux roues entremêlés, les quartiers animés, les maisons en tôles et les étals et boutiques de toute sorte.
Nous descendons cette fois vers le Djoué, rivière située à la sortie sud de la ville. Au niveau d'un pseudo rond-point, nous tournons à gauche, empruntons un étroit chemin de terre et descendons de nouveau vers le fleuve.
Source : Yengo Patrice. « Chacun aura sa part » : les fondements historiques de la (re)production de la « guerre » à Brazzaville. Cahiers d'études africaines. Vol. 38 N°150-152. 1998. pp. 471-503.