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18 mai 2012 5 18 /05 /mai /2012 14:05

Au delà des autorités locales, M. Bel nous donne un petit aperçu de la vie à Loudima en 1906. La place principale accueille ainsi un marché où les indigènes assis sur le sol doivent proposer leurs produits ou leur service. 

 

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Le marché de Loudima (© BNF - Mission Bel - 1906)

 

Une petite case permet d'abriter un troupeau d'une vingtaine de moutons et porte donc le titre de "bergerie". Elle paraît bien fragile et pourrait s'envoler à la première tornade...

 

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La bergerie de Loudima (© BNF - Mission Bel - 1906)

 

On élève aussi des boeufs. Ceux-ci semblent bien jeunes, si on en juge par leur taille, comparativement à la femme au chapeau située près de la case.

 

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Le troupeau de boeufs de Loudima (© BNF - Mission Bel - 1906)

 

Par contre, le taureau nommé "Patapouf" possède de belles cornes et est nettement plus impressionnant !


L'un des rapporteurs de la mission, le capitaine J. Mornet, Topographe du Génie, fait le constat suivant : "Dans cette région, nulle industrie, nul commerce ; un peu de caoutchouc seulement, récolté çà et là. Dans les grandes plaines du Niari et de la Loudima l'élevage serait facile. Quelques rares moutons, cabris et poulets errent seulement autour des villages, jamais soignés."

 

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"Patapouf" le taureau du troupeau de Loudima (© BNF - Mission Bel - 1906)

 

Quelques clichés montrent la population locale de la Bouenza. Notamment, lors de l'appel des porteurs Bacougni par M. Bel à Loudima.

 

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M. Bel fait l'appel de ses porteurs (© BNF - Mission Bel - 1906)

 

Liste à la main, M. Bel fait visiblement appel à un traducteur, l'homme costaud situé au premier plan, les bras ouverts. Les porteurs portent un simple pagne, mais on distingue deux hommes Noirs habillés, l'un à l'européenne, l'autre d'une longue tunique et d'un haut couvre-chef.

Le capitaine Mornet relève ainsi : "Les indigènes ne vont pas tout à fait nus, mais peu s'en faut ; un lambeau d'étoffe autour des reins constitue ici encore tout leur vêtement".

 

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Chef N'Goma du village de Soungou (© BNF - Mission Bel - 1906)

 

La mission Bel reprend la route des caravanes en direction de la côte. Elle poursuit sa traversée de la région de la Bouenza et effectue des rencontres. Ainsi, un émouvant cliché montre le chef N'Goma, du village de Soungou (à une douzaine de kilomètres de Loudima Poste). Il présente d'impressionnants "tatouages" sur l'abdomen (résultat de scarifications).


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Porteurs Bacougni à Sangha (© BNF - Mission Bel - 1906)

 

Avant la traversée de la Louvakou (juste après Moubotsi), il photographie ses porteurs Bacougni à Sangha (?). Certains semblent n'être encore que des adolescents.

 

Le capitaine Mornet rédigera une synthèse de ses observations ethnographiques "Note sur les populations du Congo entre Brazzaville et la mer", sans être spécialiste en la matière.

Il décrit les populations croisées, le peu de temps qu'il a pu observer leurs moeurs : 

 "Sur le versant oriental du Mayombe, les Bassoundi se rapprochent des Mayombe, les villages sont vastes et bien peuplés, les cultures prospères. Les indigènes consentent à sortir de leur village. Beaucoup ont été jusqu'à la mer. Ils ont un culte spécial pour les morts. Les tombes sont apparentes et dispersées le long des chemins ; elles sont ornées de faïences grossières, achetées chez les Portugais dont la frontière est tout proche. Celles des chefs sont presque luxueuses : ce sont de véritables cases, que l'on tend à l'intérieur d'étoffes et que l'on remplit d'ornements variés."


Il dresse par contre un portrait très peu flatteur des populations de l'autre côté de Loudima : 

"A l'est de la rivière Loudima, au contraire, et jusqu'à Brazzaville, les populations sont les plus inférieures qu'il soit possible de voir en Afrique. Elles vivent dans de misérables villages, dont la plupart des cases tombent en ruine ; elles font des cultures tout juste suffisantes pour leur permettre de ne pas mourir de faim. Indifférentes, d'une apathie incoercible, il n'y a à peu près rien à en tirer ; ce n'est qu'avec les plus grandes peines qu'on arrive à obtenir d'elles quelques vivres ou des porteurs. D'ailleurs, elles se dérobent le plus possible au contact de l'Européen."


Mais il tempère son propos en rapportant des éléments d'explication importants, quant à l'état de la population et à son comportement vis à vis des Européens :  

"Cela est dû d'ailleurs en très grande partie à l'impôt et surtout aux excès de portage qu'on leur a demandés ; car ces populations ont fourni un nombre considérable de porteurs, au temps du gouvernement de Brazza, avant la construction du chemin de fer belge ; elles ont laissé sur la route des caravanes un grand nombre d'entre eux, et c'est ce qui fait déserter par les indigènes cette route autrefois si peuplée, qu'on pouvait y recruter chaque mois des milliers de porteurs."

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18 mai 2012 5 18 /05 /mai /2012 14:00

L'un des plus anciens témoignages photographiques sur le Poste de Loudima est celui de Jean-Marc Bel (1855-1930). Il fit don de ses clichés à la Société de Géographie en 1923.

L'ingénieur civil des Mines et Polytechnicien avait pour mission de mener à bien l'étude d'un tracé pour un chemin de fer (20 ans après Léon Jacob et 13 ans après la mission Lechatelier...) et d'améliorer la connaissance des gisements minéraux du Congo Français (en vue d'exploiter le cuivre, le fer... notamment dans la région de Mindouli).


La Mission Bel part de France début 1906, et fait étape en Côte d'Ivoire, en Guinée-Conakry et au Gabon. L'ingénieur est accompagné de 7 personnes, dont sa femme, au titre de membre du Muséum d'Histoire Naturelle. Son "sous-chef de mission" M. Devès, part en éclaireur et débarque à Loango en mai 1906. Le "chef de mission" Bel remonte de son côté le fleuve Congo en bateau à partir de Banane, puis prend le chemin de fer belge de Matadi à Kinshasa.

 

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Vue sur le fleuve Niari à Loudima (© BNF - Mission Bel - 1906) 

 

A partir de Brazzaville, les membres de la mission Bel parcourent à pied (en tipoye ou en filanzane) la piste des caravanes jusqu'à Loango et Pointe-Noire, accompagné de porteurs (Bakhambas, Bacougni, puis Loangos). Il fait ainsi étape à Loudima. 

 

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Poste de Loudima (© BNF - Mission Bel - 1906) 

 

Les photographies nous permettent de découvrir qu'il n'existait aucune construction "en dur" en 1906 à Loudima. Difficile d'être certain, mais les bâtiments en bois et couverts de chaume semblent occuper la place centrale du Loudima d'aujourd'hui.

On devine en arrière plan le drapeau français flottant au bout d'un mât et à côté, une rangée d'arbres, qui pourrait être les manguiers centenaires de maintenant.

 

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La case des voyageurs (© BNF - Mission Bel - 1906) 

 

En tant que poste sur la route des caravanes, Loudima possède bien sûr sa "case" pour accueillir les voyageurs de passage. On suppose qu'elle n'abritait que les voyageurs "de marque", étant donné sa taille modeste et la ségrégation en vigueur. Les porteurs congolais dormaient très probablement à la belle étoile.

 

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Bureau des postes et télégraphes de Loudima (© BNF - Mission Bel - 1906)

 

Loudima possédait déjà des infrastructures administratives. Ainsi, devant le bureau des postes et télégraphes, on découvre M. de Kerkassel, administrateur, Mme de Kerkassel, et M. Gazet commis des postes. 

 

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Résidence du commandant de cercle (© BNF - Mission Bel - 1906)

 

Devant la résidence du commandant de cercle, on découvre M. et Mme de Kerkassel qui ont changé de tenue. Le chapeau a remplacé la casquette sur la tête de l'Administrateur et Mme porte une longue robe fleurie.

Tous les bâtiments possèdent une coursive extérieure, abritée derrière une palissade en bois, coursive que l'on retrouvera pour les constructions ultérieures en briques.

 

 

M. Bel rentre en France en janvier 1907 et charge E. Devès de terminer les études du sous-sol congolais, jusqu'en juillet 1907.

Au cours de la mission, des sondages furent aussi effectués en baie de Pointe-Noire afin de déterminer si le site pouvait accueillir un port maritime, terminus indispensable pour la ligne de chemin de fer. L'idée d'un port fluvial à l'embouchure du Kouilou est abandonné, et l'étude conclut au choix de Pointe-Noire, au détriment de Loango.

 

Sources : 

Rapport sur une mission au Congo français (1906-1907) par M. Jean-Marc Bel - 1908

Deux albums de 334 photos de la Mission de J.M. Bel au Congo français (1906-1907) - BNF

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