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1 août 2009 6 01 /08 /août /2009 16:00

Après avoir remercié les personnes rencontrées au cimetière, nous reprenons le 4x4 pour atteindre à quelques encablures de là, le site d'où partait les "caravanes". Nous prenons d'abord un petit chemin bordé de maisons en bois, sagement entourées d'enclos en bambous. Quelques enfants s'écartent sur notre passage. A la sortie du hameau, au bord d'un ruisseau, nous apercevons une dame qui se lave, sous la surveillance d'un homme (son mari sans doute). Elle est cependant drapée dans un pagne.

La piste qui longe ensuite le littoral est étroite et bien défoncée. Aucune indication "touristique" bien sûr... Manu rate le "bon" sentier et nous faisons donc demi-tour.
Nous descendons de notre véhicule au milieu des herbes hautes. Un peu plus bas, au milieu de la clairière, on trouve une petite stèle peinte en blanc. Il y a un cartouche mais sans aucune indication...  C'est apparemment un point symbolique de départ des caravanes.




Les "caravanes" étaient constituées par les européens et leurs porteurs qui effectuaient le trajet à pied de Loango ou de Tchissanga jusqu'à Brazzaville (ou plus récemment de Pointe-Noire à Brazzaville). Le site est utilisé dès 1887 par Albert Dolisie, premier résident à Loango. Il s'agit alors d'explorer l'intérieur du pays et de convoyer des marchandises.
Les marchandises transportées provenaient du port de Loango tout proche. Les porteurs avaient une charge de 20 à 30 kg chacun. Il fallait 25 à 30 jours de marche pour effectuer un épique et dangereux parcours de près de 600 km ! En mai 1891, 33 caravanes prennent le départ. En juin 1891, c'est 51 caravanes qui se lancent dans l'aventure (soit près de 3000 porteurs !).
Cyniquement le capitaine français Baratier (mission Marchand) considère alors que les Loangos "sont nés porteurs et qu'ils sont certainement venus au monde avec une charge sur la tête".

Plus anciennement, à l'époque de la Traite Négrière, le trajet inverse ramenait les esclaves capturés à l'intérieur des terres vers la zone d'embarquement à Loango. Ils étaient alors vendus aux occidentaux (parfois contre de simples pacotilles, comme celles que l'on voit au Musée de Diosso ; cf  Expédition à Diosso : le musée Mâ Loango ).

Le site surplombe superbement la baie de Loango. On identifie au fond la "Pointe Indienne".


 
Il parait que cet endroit abritait les habitations des européens et leurs commerces. Aucune trace ne subsiste des bâtiments (construits en bois très probablement), la végétation a repris depuis longtemps ses droits.


 
Ceci d'autant plus que des auxiliaires zélés ont dû participer à la destruction des vestiges ligneux... Je remarque en effet sur le terrain quelques termitières. 
Je suis surpris de voir une termitière en forme de champignon géant ! Dans mon esprit, une termitière ressemblait plus à une sorte de montagne pointue, telle que je l'avais vu dans des reportages.



 

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1 août 2009 6 01 /08 /août /2009 15:50

Consécutivement à l'importante érosion du rivage, une opération de déménagement des tombes anciennes a dû être mise en place. Nous avons rencontré sur place des personnes qui sont chargées de surveiller l'avancement des dégâts et de récupérer, avant qu'ils ne chutent dans l'océan, les cercueils (ou ce qu'il en reste). Les dépouilles sont ensuite de nouveau inhumées dans le cimetière, plus loin des flots irrespectueux.

Le cimetière est étrangement entretenu... au lieu de désherber, on fait brûler la végétation ! Cela donne un aspect de désolation et renforce le caractère sinistre des lieux.

 

Les tombes récentes en béton sont souvent surmontées d'une petite bâtisse ajourée. J'ai remarqué l'une d'entre-elles, agrémentée dans le fond d'une peinture murale représentant Bob Marley. C'est la dernière demeure d'Olivier, décédé en 1987 à l'âge de 25 ans, visiblement un grand fan du chanteur de reggae.
Une tombe porte le nom d'un dénommé "Bayonne". Encore une influence française sur les patronymes. Un "groupe de cases" (hameau) porte le même nom près de Diosso en 1890. L'ancêtre de la famille, un certain Mavoungou, était le cuisinier attitré d'un administrateur colonial français originaire de Bayonne. Ce dernier lui aurait promis de l'emmener un jour dans cette ville. Parlant tellement de son futur voyage à Bayonne, le cuisinier fut dénommé ainsi ! Le nom resta pour ses descendants. L'histoire ne dit pas si l'opportunité du voyage en France se présenta vraiment.

On est loin des rites ancestraux, comme sur cette carte postale (vers 1920) évoquant les "funérailles d'un chef" à Loango. Le petit enclos de bois, surmonté d'une pyramide décorée, semble recouvrir la tombe du chef.



Origine de l'érosion du littoral

Le phénomène d'érosion de la côte au nord de Pointe-Noire est observé depuis le début des années 1980, époque à laquelle il s'est accéléré. Au large de la baie de Loango, il existait encore en 1960 un important cordon littoral (lido). Cela créait entre la terre et l'océan une lagune qui protégeait ainsi le rivage des assauts des vagues. Le cordon littoral a totalement disparu à la fin des années 1980. Puis l'érosion s'est intensifiée pour atteindre 4 à 5 mètres par an dans les années 1990. On constate alors la disparition de plages entières. La houle poursuit son oeuvre destructrice en emportant le terrain très friable de la côte.
On pourrait évoquer le réchauffement climatique et l'augmentation du niveau des océans mais le phénomène est selon certaines études d'une autre origine. Le phénomène naturel de dépôt de sédiments, à l'origine du cordon littoral, a visiblement été perturbé. Il pourrait s'agir du contre-effet du creusement du port de Pointe-Noire, contrariant les courants marins. Le sable se déposerait donc dans le port et non plus dans la baie de Loango. Ces dernières années, le dragage du port a servi à remblayer les zones marécageuses de Pointe-Noire, afin d'y entreprendre des constructions. Ce sont donc au fil du temps des millions de m3 de sable et de sédiments qui échappent au littoral de Loango. Aujourd'hui, certains indiquent que le recul du rivage est par endroit de 10 mètres par an !

Le cimetière qui était à 150 m du rivage se retrouve soudain en 2002 menacé par les vagues. En 2003, le scandale éclate quand il faut sérieusement envisager de déplacer les premières tombes. Il faut dire qu'il s'agit d'un cimetière patrimonial où reposent des figures historiques du temps de la colonie française, et des personnalités congolaises comme Jean-Félix Tchicaya (membre des Forces Françaises Libres en 1943 et premier député Noir du Moyen-Congo à l'Assemblée Nationale Française en 1946) ou son fils, U'tamsi Thicaya, écrivain renommé.
En cette année 2009, j'ai pu constater l'ampleur de l'érosion, qui faute de solutions pour la contre-carrer, se poursuit inexorablement.

NB : mes sources sont notamment une approche détaillée de ce problème en 2006, disponible aux adresses suivantes : 
http://www.congopage.com/Sauvegarde-du-patrimoine-La-baie
http://www.congopage.com/L-erosion-a-Loango-un-avis-d
 

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