Nous poursuivons notre cheminement sur la voie ferrée. Nous ne savons pas à quoi ressemble le monument commémorant symboliquement la liaison entre la portion de la voie ferrée partie de Brazzaville et celle partie de Pointe-Noire. Je sais juste qu'il comporte une plaque avec un texte gravé. Nous avons peur de passer à côté sans le voir... surtout si la nature a pris le dessus ! Ce qui arrive rapidement ici.
Le temps est encore nuageux et nous ne souffrons pas de la chaleur au cours de notre marche. Trois jeunes garçons nous accompagnent dans notre modeste exploration. A un villageois qui s'enquière de loin du motif de notre présence, Manu laisse croire que je suis un descendant (un petit-neveu ou arrière petit-neveu) du Lieutenant Favre. Sans doute des membres de sa famille sont-ils déjà venus à Moubotsi. Vu sa mort assez jeune à 27 ans, je présume qu'il n'a pas eu d'enfants. L'hypothèse du descendant indirect est donc crédible !
Nous croisons un groupe de femmes qui nous saluent d'un "M'boté" sympathique. Je réponds de même. Christ est surpris et me demande si je connais la signification du mot que j'ai prononcé... Bien sûr, c'est quand même la huitième fois que je séjourne au Congo. Même si c'est pour de courtes durées, j'ai quand même appris à dire bonjour !!
Stèle commémorant l'achèvement du CFCO en 1934
Après une courbe, nous découvrons sur notre gauche le monument, abrité par une couronne d'arbres. Il n'est pas envahi par la végétation, le lieu "historique" a été entretenu. Il est assez loin de la gare, à plus d'un kilomètre je pense.
La stèle d'environ 2 mètres de haut est constituée de pierres de deux couleurs différentes. Une pierre grise (du granite ?) et une pierre ocre (du grès ?). Je ne sais pas si ces pierres proviennent du massif du Mayombe, mais ce serait dans la logique des choses.
Plaque de la stèle du C.F-C.O
La plaque de bronze rappelle que le 29 mai 1934, le Gouverneur Général Antonetti a posé ici le dernier rail, serré le dernier boulon, réalisant ainsi la liaison entre le Congo (le fleuve) et l'Océan (Atlantique). D'où le nom bien sûr de la voie ferrée et de la compagnie qui l'exploite, "Chemin de Fer Congo-Océan".
Deux petites plaques latérales indiquent respectivement les distances depuis Pointe-Noire (190,050 km) et depuis Brazzaville (320,290). On doit la sobre stèle commémorative à MM. Motch, Fredon et Squarcioni (ce dernier a laissé sa signature sur la plaque de bronze).
Cette liaison entre les deux parties de la voie ferrée ne signait pas tout à fait la fin des treize ans de travaux, puisqu'il fallut attendre le 10 juillet 1934 pour l'inauguration officielle de la ligne.
Christ et moi devant le monument du CFCO
Bien entendu, on n'échappe pas à la photo souvenir. Je prends la pose aux côtés de Christ. Puis c'est au tour de Manu, qui prend place avec les 3 jeunes garçons qui nous ont suivi. Ils ne sont pas farouches et ont vite "adopté" Manu !
Manu et des enfants du village de Moubotsi
On peut regretter qu'il ne soit pas fait mention sur ce monument du coût humain important lié à la construction de cette ligne ferroviaire, pas même une allusion, ni même un petit hommage au Lieutenant Favre qui a donné son nom à cette gare, et qui aurait pu prendre place au verso de la stèle.
Ce n'était pas l'objectif d'Antonetti qui voulait élever une stèle à sa propre gloire et laisser une trace pour la postérité. Huit décennies s'étant écoulées, la polémique sur la construction du CFCO (très virulente en France dans les années 1920-1930) étant apaisée, rien n'empêcherait les autorités congolaises de "compléter" la stèle par un hommage aux victimes de toute origine.
Notons qu'une gare dénommée "Les Saras" évoque d'ores et déjà le lourd tribut payé par ses ouvriers du chantier du Congo-Océan venus du Tchad. De même, celle dénommée "Les Bandas" évoque la mémoire des ouvriers d'une ethnie originaire d'Oubangui-Chari (correspondant en majorité à la Centrafrique d'aujourd'hui).