Près de deux mois après, je reviens sur cette actualité dramatique dont les médias européens ont peu parlé.
En ce dimanche matin du 4 mars 2012, les habitants de Brazzaville sont réveillés par une série de violentes explosions provenant du nord-est de la ville. Entre 8h et 10h45, ce sont cinq explosions très fortes qui secouent la ville.
Explosion au dessus de Brazzaville (© Louis Okamba - The Associated Press)
C'est bien sûr l'inquiétude et les mauvais souvenirs de la guerre civile reviennent en mémoire à nombre de Brazzavillois. Coup d'état, accident, sabotage, attentat... les différentes hypothèses traversent l' esprit des habitants.
Nuage de fumée au dessus de Brazzaville (© Marc Hofer. AFP)
Les premières images de la catastrophe proviennent de l'autre rive du fleuve Congo. Les déflagrations ont aussi été ressenties à Kinsasha, d'où l'on voit s'élever un impressionnant panache de fumée au dessus de Brazzaville.
Localisation des explosions à Mpila (http://achnoo.com ©)
Les explosions proviennent du dépôt de munitions de la caserne de Mpila (camp de blindés). On a évoqué tout d'abord un court circuit comme cause de la catastrophe. Et puis, plus probablement, c'est le stockage à l'air libre de plusieurs tonnes de munitions (datant de la guerre civile) qui a provoqué le grave incident. A la longue, la corrosion fait son oeuvre et les explosifs deviennent instables. Une erreur de manipulation a-t-elle servi d'élément déclencheur ?
Abords de la caserne de Mpila (© Guy-Gervais Kitina- AFP)
La caserne est en partie détruite dans le souffle des explosions et les quartiers environnants (Mpila - Ouenzé -Talangaï) sont gravement endommagés.
Maison détruite par l'explosion (http://www.congo-site.com)
L'habitat précaire des quartiers pauvres ne peut pas résister à la violence des explosions. Ceux qui n'avaient déjà pas grand-chose n'ont maintenant plus rien...
Arbres déchiquetés par les explosions (http://www.congo-site.com 2012)
J'étais passé devant cette caserne en juin 2011, pour me rendre au "port de Yoro" (cf Brazzaville : le port de Yoro ). J'ai appris que cette enclave située au nord de Mpila avait été très touchée par les explosions. C'est l'un des endroits les plus pauvres de Brazzaville qu'il m'avait été donné de voir. Misère, c'est toujours sur les pauvres gens que tu t'acharnes obstinément...
Les arbres renversés et déchiquetés que l'on voit sur certaines photos, me rappellent les baobabs de Yoro.
Tas de gravats des habitations détruites (http://www.congo-site.com 2012)
On annonce dans un premier temps le chiffre de 200 morts. Des milliers de blessés sont répartis dans les hôpitaux de la ville (environ 2 300 personnes).
Heureusement, la solidarité internationale joue son rôle et des pays comme la Russie, le Maroc le Gabon et la France envoient par avion spécial des produits médicaux et de première nécessité, ainsi que du personnel d'intervention.
En France, l'information ne fait que 30 secondes au journal de 20H et puis on n'en parle plus les jours suivants... L'Ambassade du Congo à Paris organise une collecte de dons.
Maison détruite par l'impact des explosions (© Guy-Gervais Kitina- AFP)
Des milliers de personnes sont contraintes de fuir la zone sinistrée. Les files de "réfugiés" le long des routes doivent là encore rappeler de terribles souvenirs, quand la population fuyait les combats à l'arme lourde dans la ville même.
Population fuyant la zone dévastée par les explosions (http://www.congo-site.com 2012)
Fort heureusement, aucune de mes connaissances n'a eu de membre de sa famille touché par les explosions.
Plus tard, après avoir dégagé de nouveaux corps dans les décombres, le sinistre bilan est revu à la hausse. Fin mars 2012, on annonce le chiffre officiel de 282 morts (31 mars 2012 - RFI). Mais des sources médicales évoquent un bilan plus proche des 1 000 morts...
Fin avril, on dénombre toujours plus de 9 000 sinistrés, hébergés dans des centres d'accueil et qui peinent à se nourrir convenablement. Un camp est installé près de la cathédrale.
Chose rare au Congo, des gens en colère manifestent pour obtenir l'aide promise pour le relogement. Une "allocation de soutien" de 3 millions de francs CFA doit être versée aux familles sinistrées (environ 4 500 Euros). L'Etat Congolais promet de construire 5 000 logements.
Il faut aussi dépolluer les zones sinistrées, récupérer les munitions qui traînent ça et là. Cela représente un danger non négligeable pour les munitions non explosées... Des services internationaux comme l'UNMAS (United Nations Mine Action Service) et le CICR (Comité International de la Croix Rouge) interviennent sur site. C'est dans un premier temps 16 tonnes de munitions qui ont été récupérées et détruites. Les démineurs ont travaillé dans un rayon de 5 kilomètres autour du site de l'explosion ! Le 10 mai, un responsable onusien annonce que ce sont 45 tonnes de munitions qui ont été détruites, car une quantité importante susbiste encore dans les anciennes casernes. L'opération de "nettoyage" doit s'achever en août 2012.
Pour finir sur une note plus souriante, une conséquence anecdotique, la catastrophe entraîne une pénurie de bières à Pointe-Noire ! En effet, la brasserie de Brazzaville a été touchée par les explosions. Une partie de la production ponténégrine est donc envoyée vers la capitale.
Sources :
http://www.congo-site.com
http://www.afriquinfos.com/
http://www.rfi.fr